texte sur le désert de Marc Durin-Valois "Chamelle"

Les cailloux se raréfient, noyés par un sable déferlant en nappes muettes et safranées se soulevant en vallonements toujours plus imposants.

Et revient peu à peu le décor nu des dunes, mais cette fois-ci étagé et monumental, aux élévations creusées d'ombres pâles prenant çà et là des reflets de fonte, ridées de veinules ambrées serpentant jusqu'à leurs sommets. C'est un spectacle dont l'insentité est accrue par le lent corps à corps de plages blondes et de grandes tâches obscures se disputant les pentes. la pénombre l'emporte, peignant les versants d'un brun foncé.

Tout en haut, courent d'ultimes traits d'une salive dorée de lumière qui dessinent le profil des dunes, devenues tranchantes comme de long poignards. Des innombrables vagues de colline sableuses ne restent alors que ces filaments brillants, en suspension sur le fond noirci. J'observe l'un d'entre eux.Il prend sa source dans une petite surface isolée de lumière, d'une gaieté scintillante striée de petites encoches à sa base. Un jet luminescent en émerge, et caressant la crête de la dune, coupe les grandes masses noîratres en parcourant une courbe parfaite. Ce fil luisant, d'une fragilité et d'une pureté frémissante, plus léger que l'air, ne peut résister à l'immensité des ombres qui déjà, à l'extrémité de son vertigineux balancement dans le vide, le dévorent secondes après seconde ne laissant plus qu'une fibrille amincie comme le filet cassant